short stories
Je me passionne pour la concision. Les Grecs avaient pour principe meden agan*, et je m'y retrouve bien. Je suis content du petit texte que j'ai livré dans mon avant-dernier post, ce n'est pas que soit génial, mais c'est concis, justement. Voici quelques concisiens injustement méconnus :
Georg Christoph Lichtenberg ( 1742-1799 ) ; professeur de physique dont les aphorismes étaient admirés de Kant, il nous a pondu quelques perles comme :
Cet homme avait tant d'intelligence qu'il n'était presque plus bon à rien dans le monde.
Il s'emerveillait de voir que les chats ont la peau trouée de deux trous, précisement à la place des yeux.
Et l'inoubliable un couteau sans manche, auquel il manque la lame.
Nous avons aussi Stanislaw Jerzy Lec (1909-1966) -prononcez letz. Ecrivain satiriste juif polonais, il parle couramment allemand, ce qui lui permet de s'échapper de son camps de concentration en empruntant un uniforme allemand :
Si je suis croyant ? Dieu seul le sait.
J'ai vu des cages volantes, avec des aigles à l'intérieur.
Un point d'exclamation qui s'est avachi donne un point d'interrogation.
Nous rajouterons également Félix Fénéon (1861-1944), fonctionnaire au ministère de la guerre, un temps melé à un complot anarchiste, il a écrit des nouvelles en trois lignes, collection de faits divers tout ce qu'il y a de plus divers :
Eugène Perichot, de Pailles, près de Saint-Maixent, avait chez lui Mme Lemartrier. Eugène Dupuis vint l'y chercher. Eux le tuèrent. L'amour.
Acide nitrique additionné de laudanum, breuvage qu'avala M. Paul Malauzet, de Montrouge, en apprenant que sa femme le trompait.
M. Chevreuil, de Cabourg, sauta d'un tramway en marche, se cogna contre un arbre, roula sous son tram et mourut là.
Mais je me dois de citer ce bon vieux Pierre Desproges (1939-1988) : c'est dans la forme courte qu'il exprime le mieux son talent. N'en déplaisent aux plus fervents progésiens, je trouve son roman des femmes qui tombent baclé, et il avait une facheuse tendance à s'auto-recycler. Il n'empêche, quand il écrivait des "brèves" -des informations sensées délasser le lecteur- dans le journal l'aurore, il était à son meilleur ; imaginez, vous lisez un journal bien de droite, on ne peut plus sérieux, et vous tombez en bas de page sur une rubrique intitulée "en bref" :
Un diplomate arménien a consacré tous ses loisirs, pendant cinq ans, à étudier une quinzaine de dialectes africains. Pour le récompenser de ses efforts, son gouvernement l'a nommé en Corée.
Ecoeuré, comme beaucoup de jeunes, par la vie insipide et sans avenir, Steve Keeting a tenté d'oublier en avalant une demi-bouteille de vin rouge, à Reditch, en Angleterre. C'est sa mère qui l'a découvert, fin soûl, dans son berceau.
"Je crois bien que je vais mourir de trac" , a dit Mme Maud Walker, devant les caméras de la télé australienne, au cours d'une émission de jeux. Et c'est ce qu'elle a fait.
*j'en sais rien, c'est du grec. Non, sérieusement, ça veut dire rien de trop.
Georg Christoph Lichtenberg ( 1742-1799 ) ; professeur de physique dont les aphorismes étaient admirés de Kant, il nous a pondu quelques perles comme :
Cet homme avait tant d'intelligence qu'il n'était presque plus bon à rien dans le monde.
Il s'emerveillait de voir que les chats ont la peau trouée de deux trous, précisement à la place des yeux.
Et l'inoubliable un couteau sans manche, auquel il manque la lame.
Nous avons aussi Stanislaw Jerzy Lec (1909-1966) -prononcez letz. Ecrivain satiriste juif polonais, il parle couramment allemand, ce qui lui permet de s'échapper de son camps de concentration en empruntant un uniforme allemand :
Si je suis croyant ? Dieu seul le sait.
J'ai vu des cages volantes, avec des aigles à l'intérieur.
Un point d'exclamation qui s'est avachi donne un point d'interrogation.
Nous rajouterons également Félix Fénéon (1861-1944), fonctionnaire au ministère de la guerre, un temps melé à un complot anarchiste, il a écrit des nouvelles en trois lignes, collection de faits divers tout ce qu'il y a de plus divers :
Eugène Perichot, de Pailles, près de Saint-Maixent, avait chez lui Mme Lemartrier. Eugène Dupuis vint l'y chercher. Eux le tuèrent. L'amour.
Acide nitrique additionné de laudanum, breuvage qu'avala M. Paul Malauzet, de Montrouge, en apprenant que sa femme le trompait.
M. Chevreuil, de Cabourg, sauta d'un tramway en marche, se cogna contre un arbre, roula sous son tram et mourut là.
Mais je me dois de citer ce bon vieux Pierre Desproges (1939-1988) : c'est dans la forme courte qu'il exprime le mieux son talent. N'en déplaisent aux plus fervents progésiens, je trouve son roman des femmes qui tombent baclé, et il avait une facheuse tendance à s'auto-recycler. Il n'empêche, quand il écrivait des "brèves" -des informations sensées délasser le lecteur- dans le journal l'aurore, il était à son meilleur ; imaginez, vous lisez un journal bien de droite, on ne peut plus sérieux, et vous tombez en bas de page sur une rubrique intitulée "en bref" :
Un diplomate arménien a consacré tous ses loisirs, pendant cinq ans, à étudier une quinzaine de dialectes africains. Pour le récompenser de ses efforts, son gouvernement l'a nommé en Corée.
Ecoeuré, comme beaucoup de jeunes, par la vie insipide et sans avenir, Steve Keeting a tenté d'oublier en avalant une demi-bouteille de vin rouge, à Reditch, en Angleterre. C'est sa mère qui l'a découvert, fin soûl, dans son berceau.
"Je crois bien que je vais mourir de trac" , a dit Mme Maud Walker, devant les caméras de la télé australienne, au cours d'une émission de jeux. Et c'est ce qu'elle a fait.
*j'en sais rien, c'est du grec. Non, sérieusement, ça veut dire rien de trop.
5 Comments:
exact, ainsi que de Nietzsche et de Tolstoï...vraiment un inconnu célèbre !!! En tout cas, merci de la visite, j'en suis très flatté. :)
c'est son meilleur roman "des femmes qui tombent",et c'est le seul
t'as rien compris
« Cet homme avait tant d'intelligence qu'il n'était presque plus bon à rien dans le monde. »
Ah celui-là, j'adore, c'est si bien vu ! Mais tout ce que tu cites est excellent et, question concision, j'ai des raisons d'en faire mon affaire...
monsieur Concision était un bien triste sire...
c'est son meilleur roman "des femmes qui tombent", et c'est le seul
Volontaire ? Involontaire ? De toute façon superbe !
Zombie12toes
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